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LE PORTRAIT
DU MOIS

 

KARINE LEVESQUE, « L'HYPERACTIVE POSITIVE »

 
Chaque mois un dirigeant du monde de la Santé sous notre microscope Portrait de la Directrice Générale de CSL Vifor
Chaque mois un dirigeant
du monde de la Santé sous
notre microscope
Portrait de la Directrice Générale de CSL Vifor
Par Emmanuel OSTIAN (Paris) -
 

KARINE LEVESQUE,
« L'HYPERACTIVE POSITIVE »

Ce mois-ci, rencontre avec la patronne de CSL Vifor, québécoise d'origine venue s'épanouir sur le Vieux Continent, travailleuse acharnée aux dons multiples et au coeur sur la main : elle préside aussi l'association Tulipe, qui collecte et envoie des médicaments aux populations en détresse partout dans le monde. Portrait d'une femme alignée avec ses valeurs et qui souffle un vent de fraîcheur partout où elle passe.

« Moi, tout va toujours bien, même quand ça va mal ». Karine Levesque dit ça avec cet accent de la Belle Province, irrésistible et chantant, qu'elle n'a pas perdu malgré 20 ans de vie française. Elle détonnerait presque dans ce restaurant parisien où elle irradie, au milieu de « cousins » gaulois qui n'ont pas toujours le même esprit positif. Ah, ce cher Français, dont elle avait mythifié la culture et le raffinement pendant son enfance montréalaise. La voici à présent naturalisée française, et très fière de l'être. Elle aime la France, tout simplement.

Rembobinons le fil d'une vie frénétique, avant de la retrouver directrice générale de CSL Vifor à Paris. Karine Levesque, au patronyme qui rappelle celui du célèbre René Levesque (« le cousin de mon arrière-grand-père ! ») chantre de l'indépendance québécoise, grandit à Montréal dans « une famille d'amour » qui lui donne le socle de valeurs qui la guide encore aujourd'hui. Une mère infirmière, « toujours souriante et dans le don d'elle-même » et un milieu simple mais plein de joie. De la fratrie de quatre, elle est la plus studieuse, jusqu'à l'obsession même : « Le premier grand choc de ma vie, c'est quand j'ai compris vers l'âge de 13 ans que je ne pouvais pas tout savoir ! J'en ris aujourd'hui mais c'était terrible à l'époque. J'avais cette soif d'apprendre, d'intégrer la science avec l'humain, de voir tout ça de manière matricielle et intégrée. Et puis à un moment tu te rends compte que le savoir infini n'est pas possible ». Ce trouble dépassé, la jeune fille se multiplie et dépense tous azimuts une énergie inépuisable.

POUR ALLER PLUS LOIN...

 
  • Si vous étiez un animal ?
    « Un chat ! Pour dormir, c'est tellement apaisant. »
  • Un lieu dans lequel passer le reste de votre vie ?
    « La Bretagne au bord de la mer avec les embruns. Je déteste la chaleur. Une petite maison toute simple avec des portes qui craquent, remplie de livres, un chat, le feu et les suites de Bach. »
  • Si vous ne deviez retenir qu'une qualité chez un humain ?
    « La générosité, bien sûr. »
  • Quel rêve voudriez-vous voir exaucé ?
    « Vieillir avec ma famille. »
  • Vos héros dans la vie réelle ?
    « Une héroïne du quotidien : ma mère ! »
  • Quel est le don de la nature que vous aimeriez avoir ?
    « J'aurais adoré être bonne en sport ou savoir faire quelque chose de mes mains. Je n'ai hélas aucune coordination oculo-motrice ! »
  • Quel est pour vous le comble du bonheur ?
    « Être en phase avec ses valeurs, de A à Z. »

« J'ai eu beaucoup de mal à arrêter d'étudier ! »

Dès l'âge de 14 ans, elle travaille pour payer ses études : dans une boulangerie, puis dans un magasin de vêtements, à raison de 20 heures par semaine. Ses résultats scolaires n'en souffrent pas : la bonne élève intègre l'université de Montréal, où elle va enchaîner « deux licences en sciences biomédicales et microbiologie, une maîtrise, une thèse ». Le tout en étant stagiaire en laboratoire de recherche sur le VIH, sa spécialité d'origine. Et c'est sans compter le MBA qu'elle fera un peu plus tard à l'ESSEC. « J'ai eu beaucoup de mal à arrêter d'étudier » dit-elle en éclatant de rire !

Mais le hasard lui fait croiser le chemin d'un jeune Français, à la salle d'escalade. C'est en suivant celui qui deviendra son mari qu'elle s'envole pour la France en 2003. Le choc, on l'a déjà décrit. Mais il y a aussi le bonheur de découvrir ce vieux continent gorgé d'histoire : « Nous n'avons que 400 ans d'histoire, ça n'est quasiment rien en comparaison de la France ». Elle se met à courir les concerts, (elle a longtemps joué du violoncelle) et les expositions, débute une collection de photos, se passionne particulièrement pour le plasticien Thomas Paquet qui met l'expérimentation au centre de sa création qui réenchante les imaginaires et pour qui rien n'échappe à la lumière : toujours cette fascination pour l'infini et le temps, comme lorsqu'elle avait 13 ans et que l'impossibilité de tout savoir la submergeait : « Je me pose beaucoup de questions métaphysiques. L'art c'est un vecteur d'émotion et de réflexion très fort. Il y aura toujours une part de mystère, d'interprétations multiples. Vous voyez, nous sommes là, assis à cette table, et il y a des gens en parallèle en train de vivre dans un espace-temps si différent du nôtre : on est sur la même journée, mais ce n'est pas du tout la même chose ».

« Nous sommes le leader mondial dans la prise en charge de la carence en fer »

Voilà pour la personnalité de cette pétillante et longiligne québécoise, qui trouve encore le temps de faire 6 à 7 heures de sport par semaine. Passons à la professionnelle : vingt ans de carrière tricolore, avec un début dans le conseil. Cornaquée par « une grande dame », Annie Chicoye, elle débute dans son agence. Puis elle entre chez Abbott Vascular pour mettre en place le département d'accès au marché. Elle arrive ensuite chez Vifor à la même fonction, mais les choses vont rapidement s'accélérer : d'abord, le directeur général lui propose de préparer sa succession. Et puis Vifor (2.000 salariés) va être racheté par CSL (33.000 salariés), ce qui le fait changer d'échelle. « Nous sommes le leader mondial dans la prise en charge de la carence en fer, « the Iron company » comme on nous appelle, mais aussi un acteur important dans la néphrologie et dans les maladies rares ».

Karine Levesque est intarissable sur la nécessaire prise en charge de maladies invalidantes, comme le prurit par exemple. « On a l'impression que c'est quelque chose qui gratouille, comme une piqure de moustique, mais c'est tellement plus : votre qualité de vie est altérée, vous risquez des troubles du sommeil, voire une dépression, donc les impacts sont majeurs sur la qualité de vie. Pendant des années, l'industrie a eu comme ambition de maintenir en vie, de sauver des patients et c'est en partie réussi. Aujourd'hui, il y a un changement de paradigme : maintenir en vie avec la meilleure qualité de vie possible », se réjouit-elle.

La qualité de vie, professionnelle cette fois, lui semble également une évidence : « Moi, je me lève le matin pour améliorer le parcours de soin, mais aussi pour mes équipes ! » Elle a mis en place, à l'instinct, une politique RSE au sein de CSL Vifor : « On faisait de la RSE comme M. Jourdain faisait de la prose, sans le savoir. Par exemple, on donnait des jours pour que les collaborateurs puissent faire du bénévolat. Aujourd'hui, nous sommes fiers d'avoir obtenu un label Très Haute Qualité Sanitaire Sociale et Environnementale et nous venons de recevoir un prix de la CAHPP pour nos engagements RSE ».

« Je ne peux pas avancer si je ne suis pas en phase avec mes valeurs »

Rendre au système, voilà un autre de ses mantras. Depuis toujours, le bénévolat fait partie de son quotidien : pendant ses études déjà elle s'occupait de personnes âgées ou des enfants atteints de cancer, entre ses petits boulots et ses révisions ! Étudiante, elle a même monté un programme de mentorat à l'université de Montréal pour sensibiliser 700 jeunes de milieux défavorisés. Et vingt ans plus tard c'est donc tout naturellement qu'elle vient d'être nommée présidente de l'association Tulipe, qui fournit depuis plus de quarante ans des médicaments et du matériel médical aux ONG intervenant dans des zones dévastées par des guerres ou des catastrophes naturelles. « C'est une association merveilleuse et je suis fière de pouvoir prendre la suite. Ce qui a été fait avec la guerre en Ukraine est phénoménal : Tulipe a triplé les volumes d'envoi. 150 tonnes de médicaments l'an dernier ! En tant que pays en paix, il faut savoir donner ». Elle a déjà pris son bâton de pèlerin pour convaincre d'autres labos de fournir des médicaments et pour faire mieux connaître l'association.

Au moment de la quitter, un dernier mot sur ce qui la fait avancer avec une telle gourmandise de vie : « Je ne peux pas avancer si je ne suis pas en phase avec mes valeurs. Dès qu'une décision doit être prise, je me dis : suis-je en phase avec ce que je suis ? » Donner, sourire, aller de l'avant. Comme une seconde nature. En effet, chez Karine Levesque, tout va toujours bien, même quand ça va mal. Et pour nous autres Français, ça fait quand même beaucoup de bien.

POUR ALLER PLUS LOIN...

 
  • Si vous étiez un animal ?
    « Un chat ! Pour dormir, c"est tellement apaisant. »
  • Un lieu dans lequel passer le reste de votre vie ?
    « La Bretagne au bord de la mer avec les embruns. Je déteste la chaleur. Une petite maison toute simple avec des portes qui craquent, remplie de livres, un chat, le feu et les suites de Bach. »
  • Si vous ne deviez retenir qu'une qualité chez un humain ?
    « La générosité, bien sûr. »
  • Quel rêve voudriez-vous voir exaucé ?
    « Vieillir avec ma famille. »
  • Vos héros dans la vie réelle ?
    « Une héroïne du quotidien : Ma mère ! »
  • Quel est le don de la nature que vous aimeriez avoir ?
    « J"aurais adoré être bonne en sport ou savoir faire quelque chose de mes mains. Je n"ai hélas aucune coordination oculo-motrice ! »
  • Quel est pour vous le comble du bonheur ?
    « Être en phase avec ses valeurs, de A à Z. »
Par Emmanuel OSTIAN pour Santor Edition